Ce serait dans le futur, et dans ce futur un peu low-tech, on se promène en forêt en rêvant de sylvothérapie, on fonde des partis politiques artisanaux, on s’interroge sur les modalités de renouvellement du débat démocratique à coup de métaphores alambiquées… L’Amicale (ex Amicale de production) est de retour avec cette farce d’Antoine Defoort. Dire qu’on les aime d’amour est un euphémisme ! Après Corps Diplomatique, On traversera le pont… Germinal, Les Thermes, on est très excités à l’idée de vous présenter le petit dernier. De la politique-fiction qui joue avec l’absurde et la dérision poétique, tout en caressant le vrai.
conception Antoine Defoort collaboration artistique Lorette Moreau avec Sofia Teillet, Alexandre Le Nours, Antoine Defoort et Arnaud Boulogne régie générale Simon Stenmans création sonore Mélodie Souquet création musicale Lieven Dousselaere scénographie Marie Szersnovicz production Célestine Dahan, Alice Broyelle et Thomas Riou regard extérieur Stephanie Brotchie bricolage Sébastien Vial et Vincent Tandonnet conception du robot de la réforme du fliflifli Kevin Matagne conseiller logomorphe Esprit de la Forêt diffusion Claire Girod
production l’Amicale coproduction le phénix scène nationale Valenciennes pôle européen de création / Teatro Nacional D.Maria II – Lisbonne / Atelier 210, Bruxelles / LE CENTQUATRE-PARIS / Malraux, scène nationale Chambéry – Savoie / Maillon, Théâtre de Strasbourg – Scène européenne / Le Bateau Feu – Scène nationale Dunkerque / Vooruit – Gand / le Vivat, Scène conventionnée d’intérêt national pour l’art et la création / Théâtre Saint-Gervais – Genève / Scène nationale Carré-Colonnes / Bordeaux Métropole / La Rose des Vents – Scène Nationale Lille Métropole – Villeneuve d’Ascq avec le soutien de Théâtre de Poche, scène de territoire pour le théâtre / Bretagne romantique & Val d’Ille-Aubigné / Buda – Courtrai
Télérama – 26 janvier 2022
Le débat politique ausculté au creux des bois. Une satire déjantée de la com en période d’élections. Où l’absurde et la poésie gagnent à chaque tour.
Il est apparu la première fois en 2005, lors d’une performance-conférence délicieusement nommée Indigence = Élégance. Depuis, on suit avec plaisir Antoine Defoort. Artiste singulier venu du Nord et formé aux arts plastiques, il n’était pourtant pas un acteur hors pair. Mais sa posture décalée, assumant ses propres ratages, faisait mouche. Après quelques potacheries, il opérait un retour en force au Festival d’Avignon 2012, avec Germinal – qui n’évoquait pas Zola mais nos divagations numériques.
Elles vivent (Feu de tout bois), créé en mars dernier, creuse à nouveau la veine de la disgression foutraque. Et surfe sur un terrain miné : la politique à l’aube de la présidentielle. Très fort, Defoort ! Car son libre chemin de « randonneur théâtral » flâne plus encore du côté de la fantaisie audacieuse.
Sur la scène, où sont projetées les images d’une forêt de hêtres, la comédienne Sofia Teillet (si juste quand elle se retrouve dans les situations incongrues) se présente d’abord comme « médiatrice fictionnelle ». Elle veut prendre soin du public et aussi protéger la fiction, parfois soumise à rude pression… Adhésion immédiate de la salle. Tableau suivant : sur grand écran, trois figures animées, dont les mouvements sont guidés en direct par Antoine Defoort, échangent autour d’une table. Son personnage en écoute deux autres lui présenter une « plateforme contexte et modalité ». Il s’agit de s’intéresser aux conditions d’émission et de réception du débat politique plus qu’à son contenu.
Satire de la puissance des communicants, des dérives formelles et autres astuces spectaculaires exploitées par les partis, la fable se déploie dans une novlangue qui emprunte autant aux théories du bien-être « écolo-yoga » qu’à celles de la « com ». Jamais cynique, Defoort se moque, renvoyant tout le monde dos à dos, tout en évoquant « nos peurs cachées derrière le frigo qui répandent leur jus noir ».
Son sens de l’absude comme celui de la poésie le sauvent. Ainsi, par le truchement d’un appareil à projeter les souvenirs, voyage-t-on dans l’esprit des personnages. L’un d’eux sort d’une hibernation de deux ans, vécue dans un caisson au milieu d’une pâture à vaches ! Et puis il y a cette scène étrange, où les idées (celles qui « vivent » malgré tout et pourraient nous encourager à faire « feu de tout bois ») sont matérialisées par des objets cocasses, qu’il s’agisse d’une boule de poils ou d’un nuage voletant. Hilarant. mais pas seulement…
EMMANUELLE BOUCHEZ
Antoine Defoort
v.2.2
Bonjour, bienvenue dans ma biographie.
Tout d’abord, je voudrais dire que ça me met légèrement mal à l’aise que vous ayez à lire ma biographie, c’est pas que je trouve ça follement intéressant, mais bon ça fait partie des documents habituellement requis pour les supports de communication et je voudrais pas être désagréable avec mes interlocuteurs·trices, alors voilà, j’ai fait une biographie.
Je suis né en 1978.
Bien plus tard, (mettons, en mars 2001, au pif), après avoir constaté que je ne savais plus vraiment pourquoi je m’étais lancé dans des études de mathématiques, j’ai réalisé que non seulement j’aimais ça voir des spectacles, mais qu’en plus, au fond, un spectacle, c’était juste : on vient, on s’assoit, et des gens, qui ont préalablement préparé des trucs, nous les montrent.
Aaaah. Et alors c’est con mais dit comme ça, ça m’a bien donné envie d’essayer d’en faire.
Et donc, depuis 2005, j’ai une pratique qu’on pourrait qualifier sans rougir d’expérimentale, au sens d’essayer des trucs.
Par exemple, ça m’intéresse bien de reposer à chaque fois la question du format, c’est à dire de reprendre cette définition du spectacle et d’essayer de mettre des “ou pas” un peu partout : on vient (ou pas), on s’assoit (ou pas), et des gens (ou pas), qui ont préalablement préparé des trucs (ou pas), nous les montrent (ou pas).
Et puis j’aime essayer d’aborder les choses avec un sérieux et un engagement TOTAL, que l’on va tâcher de combiner SIMULTANÉMENT avec une désinvolture et une autodérision ABSOLUE, et toute la difficulté se loge dans la simultanéité.
Et donc notamment, parfois seul, parfois avec des ami·es, j’ai / on a essayé de faire de la musique avec des ballons de foot et des paysages (CHEVAL – 2008), de faire un spectacle de science-fiction en boucle pendant 4h (&&&&& & &&& – 2009), de fabriquer une piscine à balle gravées d’aphorismes stoïciens (France Distraction / Les Thermes – 2012), de jouer à réinventer tout depuis le début (Germinal – 2012), d’imaginer les droits d’auteur comme si c’était une montagne (Un faible degré d’originalité – 2016)
Mon empreinte carbone est scandaleusement lourde à cause de tous ces voyages qu’on a fait pour montrer nos trucs, de théâtres à l’italienne en squats autogérés, de Dunkerque à Seattle et de Cherbourg à Yokohama.
En 2010, avec les collègues Halory Goerger et Julien Fournet, nous avons fondé ce qui est devenu aujourd’hui l’Amicale, une plateforme coopérative de production qu’on essaye de bricoler à plusieurs pour que ça agisse comme une sorte de safe space pour que des créateurs·trices / producteurs·trices puissent fabriquer de beaux projets en se serrant les coudes.
Lorette Moreau
Lorette Moreau est l’une des recrues belges de l’Amicale. Elle a grandi dans les années nonante à Bruxelles et elle connaît les prénoms de tous les enfants du roi Philippe. Travailleuse culturelle multi-casquettes, Lorette Moreau est porteuse de projets artistiques, renvoyeuse de balles sur des projets portés par d’autres artistes (Antoine Defoort et Julien Fournet entre autres), elle a fait de la production (avec Vincent Glowinski aka Bonom, notamment), enseigne à ARTS² (Ecole d’art à Mons) et s’essaye depuis peu à la facilitation en intelligence collective. Elle raffole de tout ce qui concerne le MÉTA, la MÉTHODO et les MODALITÉS.
Son premier spectacle, Cataclop enzovoorts, a été créé au Théâtre de la Balsamine en 2016 après un long temps d’expérimentation, notamment dans le cadre des Laboréales (dispositif de soutien à la jeune création transdisciplinaire initié par Le Manège.mons, la Bellone, la Balsamine et Buda Kunstcentrum Kortrijk).
Au printemps 2019, elle a créé le spectacle ({:}) qui a remporté le prix coup de coeur du Jury Jeunes au Festival Emulation (Théâtre de Liège).
En 2020, elle crée le projet On va bâtir une île et élever des palmiers – co-écrit avec Axel Cornil – au Théâtre de la Vie à Bruxelles. Il y est question de collapsologie, d’empathie et de gestion collective des noix de coco.
Elle est lauréate du Prix Jo Dekmine 2020, attribué par le Théâtre des Doms (Fédération Wallonie-Bruxelles / Avignon).
Alexandre Le Nours
À 7 ans, je voulais être pâtissier ou cascadeur.
À 18 ans, je suis rentré au Conservatoire National d’art dramatique de Tours.
À 22 ans, je suis parti vivre à Cannes après avoir été admis à l’Ecole Régionale d’Acteurs de Cannes puis à Marseille après en être sorti.
De mes 25 ans à mes 35 ans, j’ai surtout joué avec Théâtre à Cru (Alexis Armengol) et Lackaal Duckric (Françoiz Bouvard).
J’ai néanmoins eu le temps d’explorer le travail de Jean-Pierre Vincent, Mathilde Monnier, Delphine Eliet, Arnaud Pirault, David Gauchard et l’IRMAR. Récemment, j’ai joué dans trois mises en scène d’Aurélie Van Den Daele.
À 42 ans, je fais des tartes tatin sublimes mais je n’ai toujours pas appris à chuter dans un escalier.
Sofia Teillet
Sofia Teillet a été formée au Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique de Paris de 2006 à 2009. Elle rencontre là-bas Yann-Joël Collin professeur d’interprétation avec qui elle envisage l’adresse public comme moteur de l’écriture théâtrale. Elle continue ce travail avec deux metteurs en scène rencontrés au Conservatoire : Benjamin Abitan et Yordan Goldwaser. Sofia est également interprète pour Bernard Bloch, Pauline Ringeade. En 2017 elle joue dans En Manque de Vincent Macaigne, participe aux dernières créations de la compagnie suisse Old Masters L’Impression (2018), Le Monde (2019). Elle a rejoint en 2018 la Coopérative de projets vivants l’Amicale avec son projet De la sexualité des orchidées.
Simon Stenmans
Après trois années d’études à l’EFPME (05-08) de Bruxelles, au cours desquelles il a suivi divers stages à l’L, au Kunstenfestivaldesarts et au Théâtre Les Tanneurs, Simon Stenmans a travaillé pendant trois saisons au Théâtre Les Tanneurs en tant que régisseur général. Il travaille ensuite comme freelance, entre autres comme assistant à la direction technique du Kunstenfestivaldesarts mais aussi pour différentes compagnies, principalement estampillées dance et performance et basées à Bruxelles dont Kate McIntosh et Wooshing Machine. Il fait les créations lumière et la coordination technique de leurs derniers spectacles. Depuis peu, il travaille également avec l’association ChoréACtif et la Cie Wejna (Clermont-Ferrand).





