Au départ réalisateur de documentaires et photographe de reportage ma passion de l’image m’a amené à me tourner vers la photographie. C’est un moyen d’expérimenter, une manière d’oser de nouvelles formes. J’ai fait le choix dans mon processus de création de ne travailler qu’avec de l’argentique. J’y trouve une grande liberté dans le détournement de la lumière. Dans la réalisation d’oeuvres abstraites. La série Rayon Sombre fait suite à des recherches esthétiques sur l’utilisation de faisceaux lasers pilotés par des microcontrôleurs: la finalité, faire aboutir une intuition née par hasard de la diffraction d’un rayon de soleil sur un verre.
Le travail de recherche se mène dans chaque photographie, comment exposer l’émulsion avec un faisceau de lumière laser réfractée dans le cristal ? Je test des formes différentes, des cristals que je trouve dans les vides-greniers, certains m’ont été donnés. Tout un travail de programmation Arduino et de servomoteurs me permet de piloter le laser : sa puissance, le temps d’exposition, son placement millimétré pour obtenir la diffraction qui fonctionne, celle qui fait œuvre. Ensuite c’est dans les bains de développements que se révèle la photographie et le trajet de la lumière.
C’est de la vacuité qu’est né cette série photographique argentique. Mouvement de l’imaginaire : repli et dépli de nos pensées. Chaque tirage est unique fait d’instantanéité, d’immanence et d’imperfection : singularité de la beauté imparfaite. Le rayon de lumière noire se courbe, devient cercle. Il s’épanouit pour laisser exprimer sa vitalité faite de caches, d’émergences, de bifurcations. Une structure apparente sans schéma, complexe et infini. Un labyrinthe parfois net, parfois perdu dans les ombres. Il s’agit là de rendre compte d’un mouvement, d’une évolution. D’une structuration naissante donnée par le cristal, une forme émerge sans contour mais qui rend compte du chaos qui l’a traversée pour empreinter l’émulsion. Elle livre son univers, son interprétation sans contrainte. Alors elle se structure, s’harmonise, se concentre, devient concentrique pour libérer une nouvelle interprétation de son monde : fait de chaos, d’ombres, de plis et de recoins. Il devient possible de se rapprocher, …, encore, et de s’y perdre. Puis elle change, elle mute, évolue, redevient onde, s’extirpe et prend son apothéose métamorphique. De la brèche, ça tape, ça vibre, fracture, elle force ses limites. Et boum ! Explosion libératrice. Là voilà qui prend une nouvelle forme, courbes, vague noire lumineuse !