Référencé autant comme chorégraphe, que jongleur et acrobate, Yoann Bourgeois s’est affranchi des codes pour devenir une figure majeure de la création au sens le plus aventureux du terme. Dans Celui qui tombe, six interprètes, pris dans la force centrifuge, tentent de garder leur équilibre sur une plateforme suspendue en l’air. L’humain devient le centre de gravité de ce plateau instable, dans un spectacle-hommage à la peur, qu’elle soit du vide ou de l’humanité. Celui qui tombe, c’est aussi celui qui se retient à l’autre. Ceux qui retiennent leur souffle et reçoivent l’émotion sont dans la salle…
Jouer avec le théâtre
La question qui met en mouvement mon travail est la question des rapports, ce que Spinoza, appelle le second genre de connaissance, et la recherche d’un type de rapport particulier : «la non-manipulation». Ma recherche se développe en s’appuyant sur trois plans différents : – Une pratique, dans mon rapport aux objets – Une esthétique, dans mon rapport aux spectateurs par la recherche d’une écriture polysémique. – Une politique, dans l’existence même des oeuvres, leurs modes d’existences. Le jeu est une notion transversale qui habite ces trois plans, et c’est de là que le processus de création se met en marche ; chercher d’abord à « jouer ensemble ». « Jeu » est à entendre dans son plus large sens. J’aime sa définition mécanique : espace laissé entre deux pièces pour leur permettre de se mouvoir librement. Passé par le cirque, la danse, la musique, mon travail théâtral pourrait aujourd’hui s’envisager comme une déconstruction de tous ses éléments matériels (texte, lumière, actions, costumes, son…) et l’expérimentation de nouveaux rapports entre ces éléments. Dans l’approfondissement de cette recherche, j’aime reconstruire des dispositifs physiques permettant d’amplifier un rapport de forces qui contraint l’acteur et se joue de lui. Le sens émerge donc de cette lutte, de ce corps à corps entre le dispositif et l’individu. Y. Bourgeois – Notes, septembre 2013